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Vingt ans déjà ! par Lahouari ADDI

Il y a vingt ans, la hiérarchie militaire en Algérie décidait d’annuler les élections législatives remportées par les islamistes à la faveur de la transition démocratique inaugurée par la réforme constitutionnelle de Février 1989. C’était à la suite des émeutes d’Octobre 1988 qui montraient au monde entier que le système du parti unique est un mensonge derrière lequel les barons du régime s’enrichissaient tandis que la pauvreté gagnait les couches populaires. Le multipartisme a alors été légalisé et les différents courants idéologiques de la société sont sortis de la clandestinité pour activer au grand jour. Il était prévisible que les premiers scrutins ne seront pas remportés par les partis non islamistes, mais l’avenir leur appartenait pour peu que l’alternance électorale aura été préservée. En décembre 1991, il était normal que l’électorat vote en majorité pour ceux qui apparaissaient le plus contre le régime et qui utilisaient la religion comme facteur d’unité nationale. C’est parce qu’il était perçu comme un remède contre la corruption et un gage pour l’unité de la nation que l’électorat a voté pour le FIS.

Les résultats du scrutin ont été accueillis comme un séisme par des généraux qui avaient pris peur pour eux et pour leurs familles en raison des libertés qu’ils avaient prises dans le passé avec les biens publics. Ils ont alors décidé d’organiser un coup d’Etat contre la souveraineté populaire, ce qui indique la légèreté avec laquelle la hiérarchie a joué avec le destin du pays aujourd’hui ravagé et démoralisé. Nommés au grade de général sur des critères politiques, les officiers supérieurs de Janvier 1992 ont montré qu’ils n’avaient aucun sens de l’Etat ou des institutions, alors qu’ils prétendent s’imposer comme source de légitimité par la peur des baïonnettes. Un militaire qui n’obéit pas aux institutions politiques n’est pas un soldat mais un homme en armes.

Le prétexte invoqué était que les islamistes ne respecteraient pas l’alternance électorale s’ils arrivaient au pouvoir. Cet argument aurait eu de la consistance si, dans les quelques mois qui avaient suivi l’annulation du 11 Janvier 1992, des élections avec un scrutin proportionnel avaient été organisées. Cela aurait obligé le FIS, qui n’avait eu en décembre 1991 que 33% des suffrages, de former une coalition avec le FLN ou le FFS pour avoir une majorité parlementaire. Contre toute raison, contre toute sagesse, les généraux ont joué avec le feu et ont mené le pays au désastre. La haine entre Algériens et l’absence de confiance dans les institutions de l’Etat ont permis aux opportunistes d’occuper des postes politiques pour profiter de la prédation généralisée.

Exténués par une guerre qui leur a été imposée par un segment de leur armée, les Algériens se détournent de la politique, estimant qu’elle mène à la violence et qu’elle est l’activité des opportunistes et des courtisans sans foi ni loi. Les faux islamistes, les faux militaires et les faux démocrates ont pavé la voie aux vrais corrompus. L’histoire sera sévère avec les préposés aux affaires militaires qui ont pris la lourde responsabilité de dévier l’Algérie de son destin démocratique.