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11 janvier 2011
Une semaine après les émeutes populaires qui ont failli dévaster le pays, l’heure est aujourd’hui à la reconstruction des sites endommagés, au pansement des blessures et à l’analyse objective.
Le pays est passé de justesse à côté d’un véritable chaos. Tous les efforts déployés depuis une dizaine d’années pour reconstruire les infrastructures de base (usines, routes, établissements scolaires, édifices publics, etc.) ravagés par l’hydre terroriste ont failli être anéantis. La jeunesse algérienne qui a déferlé pendant une semaine sur les rues et ruelles des villes d’Algérie et porté haut les revendications sociales, du reste légitimes, de leurs parents, a arrêté à temps son mouvement sans une quelconque intermédiation. Ni la classe politique, ni les partis de la majorité présidentielle, ni l’UGTA, encore moins les chargés de mission de la société civile n’y ont été pour quelque chose dans l’arrêt des hostilités.
Le bilan final se résume à plus de 1 000 interpellations et à des centaines de blessés, avec 5 morts à la clé et des dégâts matériels importants qui se chiffrent en milliards de dinars. Hormis quelques foyers de tension qui persistent encore dans certaines wilayas, comme c’est le cas à Annaba où un groupe de jeunes a fermé la voie publique dans le quartier Didouche-Mourad, le calme régnait dans la quasi-totalité des régions qui ont renoué avec le calme au lendemain d’un week-end mouvementé. Depuis dimanche, jour de reprise du travail, les citoyens vaquaient à leurs occupations quotidiennes et les entreprises assurant le service public ont repris normalement leur activité. Les rues et ruelles où les affrontements violents ont été enregistrés ont toutes nettoyées. Le trafic ferroviaire, qui a connu des perturbations depuis jeudi à cause de ce mouvement de protestation, a repris normalement. A Alger, les trains de banlieue ont assuré leurs dessertes habituelles, de même que les locomotives assurant les lignes régionales ont repris leurs activités. Les établissements scolaires qui ont été gravement ou faiblement touchés par ces violences ont connu une reprise normale. Le ministère de l’Education a fait appel à des artisans et à de petites entreprises pour effectuer les premiers travaux de remise en état de ces établissements, afin de pouvoir accueillir, dans les meilleures conditions possibles, les élèves. La reprise de l’activité a été également constatée au niveau des stations-service de Naftal qui ont fonctionné normalement après que l’alimentation en carburants eut connu une certaine tension. Le gouvernement qui a pris d’importantes mesures pour faire face à la hausse subite des prix de certains produits alimentaires tels que l’huile et le sucre doit tirer les enseignements de ces émeutes pour éviter à l’avenir un nouveau chaos.
Il doit accentuer ses efforts pour mettre un terme à la mauvaise gouvernance, au laxisme de certains dirigeants, à leurs passivité et médiocrité. Quel peuple faut-il pour remettre nos dirigeants sur les rails afin d’éviter d’autres chaos ? Si le gouvernement peut compter sur un peuple conscient, un peuple qui regarde à l’intérêt général et non un peuple qui fuit la corruption, il doit vite se mettre à l’évidence que le poids de la société civile est important et qu’elle peut jouer un rôle de contre-pouvoir efficace de veille et de critique, nécessaire pour tout gouvernement afin de corriger ses erreurs ou l’alerter sur des signes inquiétants. C’est d’ailleurs le message lancé par cinq organisations syndicales (LADDH, CLA, SATEF, CNES et SNAPAP) qui ont décidé de se concerter pour réagir aux derniers jours de violences dans le pays. Dans un communiqué rendu public dimanche dernier, ces organisations ont proposé l’organisation d’une conférence nationale afin de « débattre les actions à mener pour apporter (notre) aide, soutien et solidarité à cette jeunesse ». La tripartite gouvernement-UGTA-patronat, qui devait avoir lieu à la fin de l’année 2010 afin de discuter du pouvoir d’achat, de l’augmentation du salaire et d’autres préoccupations des travailleurs, reportée sans aucune raison valable, fut une occasion ratée pour aplanir certains problèmes récurrents.
Le gouvernement n’a aucun intérêt à ignorer cet état de fait. Le verrouillage de toute expression syndicale et politique, la répression des marches pacifiques, des grèves, des réunions ne laissent aux citoyens que le choix d’une révolte désespérée. Certains partis politiques au pouvoir ou dans l’opposition commencent à appeler à un dialogue national.
Là aussi, le pouvoir doit lâcher du lest et promouvoir un dialogue fécond avec la classe politique. Le RCD, par exemple, a suggéré un débat national au sein du Parlement autour
de cette crise. Gageons que les partis majoritaires à l’APN viendront soutenir cette démarche afin de discuter les yeux dans les yeux en toute liberté sur les causes étant à l’origine de cette semaine sanglante. Ce sera la première pierre à apporter à l’édifice du projet démocratique.
Mahmoud Tadjer
Le jeune indépendant du 11-01-2011